LA SUCRERIE ET CIMENTERIE DE FRIGNICOURT
Le site géographique de ces anciennes installations industrielles est un terrain situé au coin du canal de la Marne à la Saone et de la rue Marcel Bailly qui sépare Vitry le François de Frignicourt
CREATION DE LA SUCRERIE
La Champagne est une région propice à la culture de la betterave.C'est à partir de 1811, qu'on commence à y cultiver cette plante dans sa version sucrière.Mais c'est vraiment à partir de 1812, qu'une precription gouvernementale lance pleinement cette culture en Marne et accorde des licenses de production de sucre. La mauvaise volonté et le manque d'un procédé de fabrication correct font que cette production stagne jusque la fin de l'Empire, malgré des installations de fabriques près de Sainte-Menehould et et dans l'Aube.
Après la chute de l'Empire, le sucre de betteraves ne fait plus trop parler de lui en Marne pendant de nombreuses années.Les procédés d'extraction s'améliorant, une première fabrique de sucre avec raffinerie et distillerie est installée dans la Marne à SERMAIZE en 1855.Le sucre devenant indispensable à la prospérité du pays, les sucreries se multiplient(1).
GENESE DE LA FABRIQUE
Ainsi en avril 1866 le bulletin du comice agricole de l’arrondissement de Vitry le françois parle d'un projet d’implantation d’une sucrerie dans les environs. Et en avril 1867(20), victor Faugère demande l’autorisation d’installer une sucrerie sur le bord du canal au lieu-dit « La Fontaine Ludot ».Les premières habitations étaient à l’époque à plus de 600 mètres.Celle-ci devrait être complétée d’un établissement de fabrication de noir d’animal.Ce produit entant dans le procédé d'extraction du sucre.
Une enquête fut ouverte en mairie entre mai et juin. Des briqueteries vitryates fournissent les matériaux nécessaires à sa fabrication qui commença de suite et avec 50 ouvriers , l’établissement est prêt en aout 1867.
Dès l’automne, 140 personnes y travaillaient (1) pour la première campagne (1867/1868).
Il semble que l’autorisation d’exploitation ne fut accordée que l’année d’après soit le 30 mars 1868.
Celle-ci limitait entre autre la hauteur de la cheminée à 25 m, encadrait le stockage des os nécessaires à la fabrication du noir d’animal et imposait un filtrage des eaux rejetées au canal
FRAGMENTS DE VIE DE CETTE SUCRERIE
La sucrerie ne fonctionne que 4 mois dans l’année (octobre à janvier). les semaines de travail étaient de 12 heures de travail par jours ou par nuit, avec 2h de repas.
L’effectif en campagne tourne autour des 130 ouvriers comprenant 25 femmes et 30 enfants de 16 à 17 ans (pour l’année 1872)
En inter campagne, il n’y a que 13 personnels.
Les hommes gagnaient jusque 4.75 f par jour et les enfants et femmes moins de 2f
Certaines campagnes comme celle de 1879 furent très mauvaises, mais La sucrerie de frignicourt produit, par campagne, environ 3000 quintaux de sucre pour 2500 tonnes de betteraves traitées
Les six sucreries de la marne produisaient environ 25 000 quintaux
FIN DE L'HISTOIRE
En1880/1881, la situation financière n’est pas bonne et Mr Clément Felix, directeur de la sucrerie de Sermaize sur saulx, rachète la sucrerie de la société faugère Victor en aout 1881
Le matériel étant vieillissant, Mr Félix ne fait pas fonctionner pas la sucrerie lors de la campagne 18181/1882.Certainement aussi dans le but de favoriser l'établissement de Sermaize.
Mr Felix la transforme en fabrique de vins à partir de raisins secs. Elle fonctionnera jusque vers 1892.
DU SUCRE AU CIMENT
Les batiments sont revendus à Mr Emile Gonod et Claude Girardot qui transforme le site en fabrique de ciment laitier.
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MOYENS DE PRODUCTION
L’usine occupait alors 5 hectares, possèdait 2 grues à vapeur et 10 fours et une puissance de 600 chevaux vapeur.le quai sur le canal permettait à huit péniches d’aborder pour le déchargement des matières premières et le transport des produits finis. Une voie ferrée la raccordait au réseau de la compagnie de l’Est.
Le calcaire arrivait par péniche, appartenant à la société des sites de Couvrot et de Vitry en Perthois (Louvières), le laitier arrivait aussi par le canal de Pont à Mousson
Le site disposait de 2 à 3 grues mais beaucoup de transport se faisait à dos d’hommes
Une couche de ciment était continuellement présente dans l’usine et de nombreux cas de silicose existaient.
vision architecturale de la cimenterie avec le silo, tirée de (3).
La cuisson avait lieu dans 17 fours verticaux dont on voit encore les vestiges le long du canal
Un silo de 7000t de 31 m de haut et 20 m de diamètre a été construit mais n’a jamais servi
PRODUCTION
Un procédé de tuyaux en ciment avait été inventé par Mr Girardot et sera breveté plus tard par Lafarge
On y fabrique de la chaux dite de Marne, un ciment laitier et divers agglomérés
Vers 1900 l’usine produisait 110 000t de ciment laitier, 105 000 t de chaux et 40 000 m de tuyaux en ciment
SUITE ET FIN
Le site devenu cimenterie passera en 1905 à Mr Jean Pavin de Lafarge. Mais les produits continuent à etre vendu sous les noms des créateurs
En 1934, l’usine cesse sa production.Et elle devient Entrepot de stockage de ciment. L’effectif descend à 10 personnes.
L'usine est en grande partie détruite pendant les bombardements de la seconde guerre mondiale
La société EMCO s’installe de 1946 jusque 1954 pour la confection de sacs kraft pour le ciment.
Une entreprise de transport racheta le site en 1968.
Aujourd'hui, il ne reste que quelques vestiges de murs et ce remarquable silo qui mériterait d'etre classé.
TRACES DU PASSE
plan du canton de 1876 dans lequel est mentionné la sucrerie.
SOURCES
(1) Société d'agriculture, commerce, sciences et arts de la Marne. Mémoires de la Société d'agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne. 1967. Les origines de la culture betteravière dans la Marne (1811-1871) Georges CLAUSE université de REIMS. (BNF)
(2)150 ans de sucre à Sermaize 1854 2004 Pierre Richard edition gueniot
(3) Histoire de la cimenterie de Frignicourt par Gilbert Maheut